« Dans la philosophie grecque et plus précisément dans la pensée d’Aristote, l’art et la technique sont des sujets qui prêtent à débat depuis des siècles. Au fil du temps, l’Homme savant s’est servi de ses mains pour créer, façonner le monde à sa manière et selon sa vision. Mais comment allier technique et art ? Le pont actuellement en construction à l’entrée Est de la ville, au droit du conservatoire Manitas de Plata peut servir d’exemple concret et apporte un élément de réponse. Jean Denant, artiste sétois dont l’œuvre “La traversée”, ce miroir reflétant la méditerranée, attire les regards depuis 2014 sur la promenade du Maréchal Leclerc, est chargé de l’habillage artistique de l’ouvrage qui reliera l’avenue Martelli au quai des Moulins. Ce pont, qui aura pour mission de désengorger cet axe très emprunté représentera à lui seul, une œuvre d’art. Pour l’artiste, ce projet est un virage dans sa carrière : “ce travail s’articule autour de l’art et de l’ouvrage technique. Il ne s’agit pas d’une œuvre figée dans l’espace, ni totémique”. Car au-delà d’avoir dessiné l’ouvrage et imaginé un revêtement en inox qui viendra l’habiller, Jean Denant a dû prendre en compte les aspects techniques de cette création : “Une étude autour de la colorimétrie du béton était nécessaire afin qu’elle rappelle les couleurs des persiennes du conservatoire, et il fallait aussi prendre en compte l’évolution de cette zone qui tend à devenir un quartier d’habitations. S’il s’agit d’un projet artistique, ce pont est aussi un élément urbanistique qui servira au gens”. Côté technique, cette grande robe d’inox courbée fera office de miroir, élément phare de l’œuvre de Denant. Un miroir d’où se refléteront les différentes couleurs qu’offre le ciel et le canal, selon les heures de la journée. Dès le lancement du projet, l’artiste tenait à ce que ce pont s’intègre dans un territoire qui regroupe des fleurons de la culture sétoise : “Le pont est à double facette. Il est à la fois un pont routier, un ouvrage d’art et une passerelle vers la culture puisqu’il dessert le conservatoire et les chais artistiques du quai des moulins”. Une fierté pour cet amoureux de Sète, qui perçoit dans ce projet l’arrivée de l’art dans la construction moderne : “En confiant à des artistes le soin d’imaginer la ville de demain, la municipalité leur permet de sortir l’art des galeries et des ateliers et ne plus seulement l’apparenter au ‘beau’ mais aussi à l’utile”. Mais pour l’instant, encore un peu de patience… L’ouvrage sera livré en fin d’année. »